Gestion de l'eau en agriculture : les 4 propositions de France Nature Environnement

Records de chaleur, épisodes de canicule, vagues de sécheresse… alors que les changements climatiques font peser des contraintes fortes sur l’ensemble des usagers de l’eau, cette ressource est surexploitée. Une surconsommation qui met nos milieux naturels en danger : c’est ainsi notre accès à l’eau, qui plus est à une eau de qualité, qui est mis en péril. L’agriculture, qui est le secteur le plus consommateur d’eau, doit donc voir ses modèles évoluer pour s’adapter aux ressources dont les territoires disposent. France Nature Environnement avance quatre propositions pour une gestion quantitative de l’eau en agriculture qui soit juste, adaptée et durable. Ces propositions de bonne gestion auront aussi, si elles sont déployées efficacement, un impact fort sur la qualité des eaux, l’un des grands enjeux de notre époque.

 

Afin de faire face au manque d’eau et aux phénomènes de sécheresse de plus en plus fréquents, il est urgent de diminuer la consommation d’eau et d’ajuster les prélèvements en fonction des ressources disponibles. Pour cela, il est nécessaire de déployer une politique d’économie d’eau dans tous les domaines : agricole, mais aussi domestique, industriel et touristique. Pour assurer une alimentation en eau potable indispensable à la consommation humaine, ces activités vont devoir adapter leurs pratiques pour utiliser moins d’eau de manière générale et moins d’eau potable en particulier. France Nature Environnement se mobilise donc une répartition de la ressource en eau qui soit équitable et responsable, dans une logique globale d’économie d’eau.

 

1. Savoir ce que l'on a, pour savoir ce que l'on peut utiliser

 

AMELIORONS LA CONNAISSANCE DE L’ETAT DE LA RESSOURCE A L’ECHELLE D’UN BASSIN HYDROGRAPHIQUE

Actuellement, les volumes d’eau prélevée et consommée, notamment à usage agricole sont mal connus, par manque de suivi et d’équipement (compteurs d’eau), ce qui ne permet pas une gestion maitrisée à l’échelle d’un bassin versant. Pour une bonne gestion de l’eau, il est indispensable d’avoir une connaissance fine de l’état des stocks, des usages du territoire et des volumes prélevés sur l’ensemble d’un bassin. Cela permet d’anticiper les moments de disponibilité, de tension et les pénuries pour déployer une gestion adaptée, évitant ainsi au maximum les situations de crise et d’interdiction de prélèvement.

 

NOS PROPOSITIONS

  • Etablir un état des lieux des équipements existants pour chaque bassin hydrographique : volumes stockés, forages, taux d’utilisation, répartition dans l’espace, etc. ;
  • Dresser le bilan des prélèvements et des consommations agricoles ;
  • Établir le bilan des demandes en prélèvements par bassin hydrographique ;
  • Adapter progressivement les volumes prélevables aux volumes réellement disponibles, pour garantir un bon fonctionnement des milieux.

Nous voulons un diagnostic precis de la situation pour déployer des modes de gestion éclairés.

 

2. Rendons à la nature ses capacités d’auto-régulation

 

RESTAURONS LES INFRASTRUCTURES NATURELLES POUR REGULER LES RÉGIMES HYDRIQUES

Les milieux qui stockent naturellement l’eau sont menacés. Il est important de les protéger pour qu’ils puissent retenir l’eau et lui permettre de s’infiltrer dans les nappes souterraines. Les zones humides, par exemple, constituent des éponges naturelles qui stockent l’eau en cas d’inondation et la restituent aux milieux en cas de sécheresse. Les milieux forestiers stockent également l’eau, qui est ensuite soit infiltrée dans le sol, soit relâchée par les arbres. En zone agricole, la même logique doit s’appliquer avec la plantation de haies, le maintien des talus et des fossés qui favorisent l’infiltration de l’eau. L’ensemble de ces infrastructures naturelles sont des outils naturels essentiels qui participent activement à la gestion quantitative des ressources en eau.

 

NOS PROPOSITIONS

  • Conserver et restaurer les zones humides et les milieux forestiers ;
  • Rétablir la connexion des cours d’eau avec les annexes hydrauliques (zones humides, zones naturelles d’expansion de crues, etc.) ;
  • Rétablir les continuités écologiques pour assurer les écoulements naturels de l’eau et les échanges avec les nappes ;
  • Appliquer effectivement les obligations réglementaires de bandes enherbées et de protection des haies.

 

Nous voulons un retour au bon fonctionnement et à la résilience des écosystèmes pour garantir le bon déroulement du cycle de l'eau.

 

3. Passons à l’agroécologie

 

ASSURONS LA PROMOTION DES SYSTEMES DE PRODUCTION AGROECOLOGIQUES

Les modèles de production doivent évoluer pour s’adapter au contexte de changements climatiques. Il est urgent d’orienter les systèmes de production vers l’agroécologie, qui promeut à la fois des systèmes économes en eau et qui favorisent l’infiltration et la rétention de l’eau dans des sols agricoles vivants. Ces systèmes agroécologiques sont définis par un ensemble de critères :

  • Couverture des sols ;
  • Diversification des productions avec 4 cultures au minimum, dont la principale n’excède pas 50% des surfaces et la minoritaire représente au moins 10% ;
  • Maintien des prairies existantes, temporaires ou permanentes ;
  • Maintien des haies, talus et fossés ;
  • Respect d’un maximum de 10 ha ou de 10% de la SAU irriguée à l’échelle de l’exploitation ;
  • Limitation de l’usage de pesticides : diminution effective de 30% par rapport aux références du territoire et baisse continue vers un objectif de -50%.

 

NOS PROPOSITIONS

  • Etablir des référentiels techniques et économiques, sur chaque territoire, pour limiter l’aversion au changement en montrant que ces modèles agroécologiques fonctionnement ;
  • Soutenir financièrement ces modèles avec des primes allouées pour les services environnementaux rendus et une aide à l’investissement dans du matériel adapté aux nouvelles pratiques agroécologiques ;
  • Conditionner la création de stockages nouveaux à l’adoption de ces systèmes et donc au respect des critères précédents ;
  • Réserver les financements publics exclusivement aux projets qui respectent les règles de protection des milieux.

 

Nous voulons une agriculture durable qui produise une alimentation de qualité, qui crée de la valeur dans les territoires et qui préserve les ressources naturelles.

 

4. Mettons tout le monde autour de la table

 

AMELIORONS LA GOUVERNANCE DE L’EAU DANS LES TERRITOIRES

La gestion stratégique et opérationnelle de l’eau doit être gérée par bassin hydrographique et en concertation avec l’ensemble des acteurs du territoire. Les associations de protection de la nature et de l’environnement doivent être présentes dans toutes les instances décisionnelles liées à l’eau, à toutes les échelles territoriales. Les décisions doivent être prises de façon transparente et argumentée, surtout celles qui concernent les volumes prélevables.

 

NOS PROPOSITIONS

  • Rendre publiques l’ensemble des données liées à la gestion opérationnelle de la ressource en eau ;
  • Maintenir des comités de pilotage spécifiques à la gestion opérationnelle de la ressource, représentatifs de l’ensemble des usagers et avec un pouvoir décisionnaire ;
  • Imposer des justifications argumentées des décisions préfectorales liées à l’eau, notamment dans le cas des dérogations aux arrêtés sécheresse.

 

Nous voulons une gouvernance de l'eau transparente et inclusive, qui prend en compte les enjeux de tous les acteurs sur chaque territoire.

Retrouvez l'article original sur le site de FNE ici.

 

En parallèle, retrouvez l'avis de l'UFC Que choisir Pour une vraie réforme de la politique agricole de l'eau - 08/08/2017

 

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