La vie disparait sur terre et nos gouvernants regardent ailleurs …
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Le constat est accablant
Ce ne sont pas des prévisions alarmistes pour les décennies à venir, mais des faits avérés, des constatations
objectives et catastrophiques. Les espèces animales et végétales (et sans doute microbiennes) ont disparu
au cours de ces dernières décennies, et disparaissent aujourd’hui, à une vitesse encore jamais observée
depuis l’apparition de la vie sur terre. Actuellement, les taux d’extinction sont 100 à 1000 fois plus élevés
qu’ils l’ont été au cours des 65 derniers millions d’années.
Les exemples qui suivent sont éloquents et dramatiques. Ils confirment l’effondrement de la biodiversité,
c’est à dire l’effondrement de la vie sur terre, sur un laps de temps très court :
• Le World Wide Fund (WWF) pour la nature rapporte en 2014 un déclin de 58 % des effectifs de
vertébrés sauvages entre 1970 et 2010 !
• Très récemment, une étude allemande, parue dans la revue internationale Nature en 2017, indique
une baisse de 78 % des effectifs d’insectes volants, dont de nombreux pollinisateurs, en moins de
30 ans ! Cette disparition des insectes explique, pour partie, l’effondrement des populations
d’oiseaux rapporté dans une étude du CNRS et du Muséum publiée en mars 2018 (baisse de 55%
des effectifs d’oiseaux en moins de 25 ans !).
• Selon l’Organisation des Nations unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (Rapport FAO, 2010),
75% de la diversité des cultures a été perdue au cours du siècle dernier.
• En 50 ans, un déclin de 80 % de la population du lion d’Afrique a été noté (Informations de
l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature - IUCN).
• Etc.
Les prévisions faites par les experts internationaux pour les décennies à venir sont tout aussi dramatiques :
• Au rythme actuel d’extinction des espèces, la moitié de l’ensemble de toutes les espèces vivant sur
terre aura disparu en 2100 (Millenium Ecosystem Assessment, 2005).
• L’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) prévoit la disparition de ¾ des
espèces de mammifères et de 70 % des plantes dans les deux siècles à venir.
• Plusieurs espèces emblématiques et patrimoniales sont appelées à s’éteindre très rapidement.
Ainsi, entre autres espèces menacées, les ours polaires, les grands animaux marins (baleines,
dauphins, requins, thons, etc.), les éléphants et les lions d’Afrique, les gorilles, pourraient
disparaître au cours des décennies à venir.
L’homme est responsable
Nous vivons donc actuellement la 6ème crise d’extinction des espèces sur terre et l’homme en est l’unique
responsable. En effet, les principales causes de l’effondrement actuel de la biodiversité sont toutes en lien
avec les activités humaines.
Il s’agit, par ordre d’importance décroissante : 1) de la destruction des habitats (agriculture intensive,
industries d’extraction, déforestation, transports, etc.) 2) de la pollution généralisée des écosystèmes, 3) de
la surexploitation des ressources naturelles (poissons, bois exotiques, etc.), 4) de la destruction directe des
espèces par la chasse, le piégeage et le braconnage, 5) les changements climatiques, 6) des invasions
biologiques liées à l’introduction le plus souvent illicite d’espèces allochtones et 7) les enchaînements
d’extinction résultant notamment de ruptures dans les chaînes alimentaires.
La biodiversité est indispensable à la vie de l’homme sur terre
La biodiversité, c’est à dire l’ensemble des interactions entre toutes les espèces qui vivent sur notre
planète, n’est pas qu’un simple sujet d’intérêt pour les scientifiques, les écologistes et les naturalistes. Elle
ne se réduit pas aux belles fleurs et aux jolis papillons … C’est en effet la biodiversité qui permet le
fonctionnement de l’ensemble de la biosphère et soutient le développement de toutes les sociétés
humaines, en fournissant des ressources (aliments, médicaments, matériaux, etc.) et des services
(régulation du climat, épuration de l’eau, fertilité des sols, services culturels, etc.).
Or, corrélativement à l’effondrement de la biodiversité en lien avec les activités humaines, les services
écosystémiques se dégradent depuis plusieurs décennies. En effet, la destruction de la biodiversité ne se
limite pas à la disparition des espèces et à la baisse des effectifs de celles qui survivent, elle entraîne
également l’altération du fonctionnement des écosystèmes, ce qui, directement ou indirectement, a un
impact négatif sur la production alimentaire, la santé, l’accès aux ressources naturelles, le climat, etc.
Ainsi, les experts du programme de l’ONU MEA (Millenium Ecosystem Assessment - 2005) ont estimé que 60
% des services écosystémiques étaient en déclin ou menacés. L’étude « The economics of Ecosystems and
Biodiversity » (TEEB, 2008), conduite à l’initiative de la Commission Européenne, a montré que la perte des
services écosystémiques était de l’ordre de 50 milliards d’euros par an. Cette même étude montre que la
planète perd chaque année entre 2000 et 4000 milliards de dollars de capital naturel. Enfin, à titre
d’exemple, nous pouvons rappeler que le coût de la disparition des abeilles et des autres pollinisateurs a
été évalué à 230 milliards de dollars canadiens par an.
Les décisions prises par les gouvernements ne sont pas à la hauteur des enjeux
Nous vivons donc actuellement une catastrophe écologique globale, sans précédent, et face à ce constat
indiscutable, le comportement des gouvernants, aussi bien au plan national qu’au plan international, est
irresponsable. La préservation de la biodiversité nécessite, en effet, une vraie politique globale de
protection de notre environnement, qui ne se réduit pas à une politique de communication, ou pire
encore, à du marketing environnemental (« green washing »), une politique qui ne cède pas aux lobbys
financiers et aux intérêts catégoriels. La préservation de la biodiversité doit être un élément central de
toutes les politiques publiques, ce qui n’est absolument pas le cas actuellement.
En particulier, concernant la gestion de l’agriculture, qui a un impact majeur sur la dynamique de la
biodiversité, il est urgent de se diriger vers la mise en oeuvre généralisée de l’agro-écologie. Cette dernière
est basée sur la réhabilitation du bocage, le mise en place d’une couverture végétale permanente des sols,
l’enrichissement en humus, la fixation symbiotique de l’azote de l’air par les légumineuses, la
diversification des cultures, l’agroforesterie, la renonciation aux monocultures de l’agro-business, le retour
à une relation respectueuse entre l’homme et l’animal, ainsi que la promotion de la recherche-action
participative avec les sociétés rurales.
Par ailleurs, les préoccupations, totalement légitimes, qui concernent les changements climatiques, ne
doivent pas masquer l’enjeu majeur que constitue l’effondrement actuel de la biodiversité au niveau
mondial. Ces deux combats sont à mener de front.
En effet, il faut bien comprendre que les pertes de biodiversité correspondent à des pertes d’information
qui ont été acquises par l’évolution au cours de milliards d’années. En perdant cette information, on prive
les générations futures des bienfaits de « l’inventivité » de la nature et d’un large éventail de capacités
d’adaptation aux changements globaux qui menacent actuellement la planète.
La biodiversité est la seule assurance vie de l’humanité.
Préserver la biodiversité, c’est préserver l’avenir de l’humanité.
(Groupe Scientifique de Réflexion et d’Information pour un Développement Durable)
Contact : Christian Amblard (
Association GREFFE : http://groupe-greffe.wix.com/groupe-greffe