CSOV - Observations FRANE / FAN à l' enquête publique 2013 - les mesures compensatoires

 

Les mesures compensatoires

 

Toujours d’après le SDAGE, dès lors que la mise en œuvre d’un projet conduit, sans alternative avérée, à la disparition d’une zone humide, les mesures compensatoires doivent prévoir dans le même bassin la recréation ou la restauration de zones humides équivalentes sur le plan fonctionnel et de la qualité de la biodiversité.

 

Plus précisément, le SDAGE dispose :

- « Objectif à part entière de la directive cadre sur l’eau, la non détérioration de l’existant s’impose logiquement comme un préalable à tous travaux sur les cours d’eau. Il ne s’agit pas d’interdire tout nouvel aménagement mais de prévoir des mesures suffisantes pour compenser les effets négatifs des projets. » (objectif 1.A « Empêcher toute nouvelle dégradation des milieux »)

- « Lorsque les mesures envisagées ne permettent pas de réduire significativement ou de compenser les effets négatifs des projets pour respecter l’objectif des masses d’eau concernées, ceux-ci font l’objet d’un refus, à l’exception des projets répondant à des motifs d’intérêt général (projets inscrits dans le Sdage, relevant du VII de  l’article L. 212-1 et des articles R. 212-7 et R. 212-11 du code de l’environnement). » (disposition 1.A-1)

- « Dès lors que la mise en oeuvre d’un projet conduit, sans alternative avérée, à la disparition de zones humides, les mesures compensatoires proposées par le maître d’ouvrage doivent prévoir, dans le même bassin versant, la recréation ou la restauration de zones humides équivalentes sur le plan fonctionnel et de la qualité de la biodiversité. A défaut, la compensation porte sur une surface égale à au moins 200 % de la surface supprimée. La gestion et l’entretien de ces zones humides doivent être garantis à long terme. » (disposition 8.B-2)

 

Une mesure compensatoire (ou une compensation écologique) est définie de la façon suivante : « Mesure en faveur de l’environnement permettant de contrebalancer les dommages qui lui sont causés par un projet et qui n’ont pu être évités ou limités par d’autres moyens. » (Commission générale de terminologie et de néologie, Vocabulaire de l’environnement [liste de termes, expressions et définitions adoptés], JORF n°0029 du 4 février 2010 page 2100 texte n° 97).

 

Il sera rappelé que les décisions administratives dans le domaine de l’eau doivent respecter les dispositions d’un SDAGE (article L. 212-1 X du code de l’environnement).

 

En l’espèce, sur le plan fonctionnel, les mesures avancées dans le dossier sont inopérantes.

 

Le dossier le reconnaît-lui-même : « La surface de 52 ha […] ne peut être retrouvée dans le secteur avec de bonnes conditions fonctionnelles » (p. 43).

 

Deux des mesures se situent à Avermes : site des Verdiaux sur 21 ha et de Chavennes sur 5 ha, à 60 kilomètres en aval du projet de pont !

 

Le surcreusement du lit qu’entrainerait l’ouvrage routier devrait pouvoir être compensé par un apport d’alluvions et c’est par conséquent en amont que devraient être prévues des mesures pour restituer à la rivière la mobilité nécessaire à cet effet.

 

C’est aussi en amont du projet que la rivière est le plus contrainte par des enrochements de berges et où son lit s’enfonce de plus en plus.

 

Les deux mesures proposées à l’aval n’auraient donc aucun effet compensatoire sur le plan fonctionnel.

 

Pour le troisième site, situé à Mariol, l’enlèvement d’épis proposé en amont, à la « boucle du Buisson », n’apportera pas d’alluvions supplémentaires et rien de plus sur le plan de la biodiversité car le contournement de ces épis est déjà en cours par le courant qui réalise l’opération en évitant même les perturbations qu’apporterait une pelle mécanique dans le milieu aquatique.

Lors de la cinquième réunion du comité de suivi, le 26 avril 2012, l’inefficacité de cette mesure a été observée par le Conservatoire d’espaces naturels de l’Allier :

 

"Madame la directrice du CEN Allier estime que les épis existants dans "la Boucle du Buisson"  sont inefficaces et par voie de conséquence que la restitution d'une part importante de surface à la rivière Allier est déjà acquise. Il est répondu d'une part que sur l'ensemble des sites (plus de 60) répertoriés sur l'ensemble du cours de l'Allier dans le département, la qualité des enrochements existants sont de qualité aléatoires, d'autre part que des investigations complémentaires sont menées en limites interdépartementales Sud et Nord de l'Allier. Une réflexion "plus qualitative" est engagée sur le site de certaines gravières"

 

Ainsi, ce nouveau projet demeure illégal puisque la proposition desdites mesures contrevient aux dispositions du SDAGE Loire-Bretagne et notamment de celles de l’article 8.B-2 qui exigent la recréation ou la restauration de zones humides équivalentes tant sur le plan fonctionnel que sur le plan qualitatif (Production annexée aux présentes observations).

 

A l’égard de cette disposition 8.B-2 du SDAGE, une fiche de cadrage a été réalisée par les services de l’Etat (Ministère de l’écologie, DREAL Centre – Bassin Loire-Bretagne), l’Agence de l’eau Loire-Bretagne et l’ONEMA en novembre 2010 (Commission administrative du bassin Loire-Bretagne, Fiche d’aide à la lecture du SDAGE Loire-Bretagne, « Application de la disposition 8B-2 du SDAGE Loire-Bretagne sur les zones humides », Production annexée aux présentes observations).

 

Cette fiche, bien que dépourvue de caractère réglementaire, est fort instructive quant à l’interprétation et à l’esprit des dispositions de l’article 8.B-2 :

- Elle rappelle d’abord que le sens général des orientations et dispositions du chapitre 8 du SDAGE consacré aux zones humides est que « la préservation des zones humides est la règle et leur destruction l’exception » (p. 2).

- Elle souligne que la notion de bassin versant implique des échelles très variables et que les mesures compensatoires doivent « permettre de conserver globalement la valeur écologique des milieux, voire de la valoriser. La compensation devra donc logiquement être trouvée à proximité de la zone humide détruite » (p. 5).

- Elle indique que la zone humide restaurée ou recréée devra assurer « toutes les fonctionnalités de la zone détruite, au moins à un niveau optimal » (p. 7).

-Elle conclut : « La zone humide proposée en compensation de la zone humide détruite devra optimiser l’équivalence sur les critères liés aux fonctionnalités ET sur ceux de la qualité de la biodiversité » (synthèse p. 13[1]).

 

De plus, les mesures affichées dans le dossier ne sont pas compatibles avec la doctrine du ministère de l’environnement déjà citée. Cette doctrine demande que les mesures compensatoires soient additionnelles aux actions publiques existantes ou prévues en matière de protection de l’environnement. Les désenrochements prévus dans le dossier sont déjà exigibles au sens de la « DCE » ; aucun ne déplace une contrainte forte de façon additionnelle aux actions de restauration morphologique éligibles au Xème programme de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne et au Plan Loire.

 

Il est surprenant enfin que, parmi les mesures compensatoires, le pétitionnaire préconise d’augmenter les volumes d’enrochement, déjà abondamment mis en œuvre dans son projet, pour conserver les plans d’eau de carrières par renforcement de leurs protections qui sont la principale cause de dysfonctionnement du cours d’eau. Sauf rares exceptions, tous les gestionnaires sont en accord pour effacer ces fosses progressivement puis leurs protections avec des techniques étudiées au cas par cas, permettant de ne pas pérenniser leurs nuisances actuelles sur la ressource en eau des nappes latérales : eutrophisation, échauffement, évaporation et abaissement constant de la ligne d’eau.

 

Pour conclure sur les mesures compensatoires, aux termes de la disposition 1.A-1 du SDAGE, lorsque les mesures compensatoires des travaux impactant le lit d’un cours d’eau ne permettent pas de réduire significativement leurs effets, les travaux projetés doivent faire l’objet d’un refus d’autorisation.

 

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