Messieurs les ministres, sauvons la politique de l’eau !

Monsieur Nicolas HULOT, Ministre de la transition écologique et solidaire,
Monsieur Bruno LE MAIRE, Ministre de l’économie et des finances,
Monsieur Gérald DARMANIN, Ministre de l'action et des comptes publics,

 

La France compte plus de 600 000 km de rivières, de nombreux lacs, des zones humides et des nappes d’eau souterraines ; patrimoine naturel exceptionnel qui rend d’inestimables services environnementaux, sanitaires, sociaux et économiques. C’est un capital vital pour la qualité de vie de nos concitoyens, source d’aménités nombreuses et de ressourcement, et dont la beauté participe grandement à l’attractivité de notre pays. La garantie d’accès à l’eau potable tant en qualité qu’en quantité et à des prix raisonnables aujourd’hui et demain, le bon fonctionnement des milieux aquatiques et leur restauration, ainsi qu’une répartition équilibrée entre les différents usages de la ressource en eau, sont des objectifs fixés par la loi et que nous estimons essentiels.

 

A partir de 1964 et de la création du « système des Agences de bassin », les efforts conjugués des pouvoirs publics et de l’ensemble des usagers et partenaires (notamment associatifs que nous représentons), ont permis une longue et progressive reconquête de ce patrimoine irremplaçable et de la qualité des eaux ; avec notamment la stabilisation puis le recul de l’impact des rejets domestiques sur le milieu naturel. Aujourd’hui loin d’être achevée, cette reconquête doit se poursuivre au regard de la situation des eaux, de l’émergence de nouveaux polluants, de la précarité de certains usages de l’eau et de la dégradation des milieux naturels.

 

Depuis des années ce système a été mis à mal par les prélèvements répétés, au bénéfice du budget de l’Etat, de sommes de plus en plus conséquentes. Nous avons chaque fois protesté contre ces prélèvements qui non seulement rendent de plus en plus difficile l’action des agences de l’eau, et qui contribuent à rendre plus illisible encore la facture d’eau de nos concitoyens en faisant de l’eau une base fiscale et en dérogeant au principe fondateur de la loi « pollueur-payeur ». Aujourd’hui, le projet de loi de finances, tel qu’il est sorti de la première lecture de l’Assemblée Nationale, porte ces prélèvements à un niveau inédit qui placerait le « système agences » dans une situation préoccupante dès 2018 et mettrait en péril l’équilibre des 11èmes programmes d’intervention actuellement en cours d’élaboration au sein des instances de bassins. Au final, les prélèvements de l’Etat s’élèveraient en effet à près de 500 millions d’euros soit une augmentation brutale de plus de 60 %. Parallèlement, une politique de réduction des effectifs aveugle désorganiserait le fonctionnement interne des Agences, dont les compétences et les missions devront aussi s’élargir à la biodiversité.

 

Ces dispositions du projet de loi de finances pour 2018 mettent en péril un système qui a fait ses preuves depuis sa création en sapant les bases mêmes de son acceptation sociale et sociétale. Elles mettent en péril l’atteinte par notre pays des objectifs prescrits par la Directive Cadre européenne sur l’Eau alors que nous sommes encore loin du compte.

 

En conséquence nous vous demandons d’intervenir et de conforter notre politique de l’eau, en revenant sur les orientations néfastes prises récemment qui constituent un retour en arrière sans précédent d’une politique tournée vers l’intérêt général et l’anticipation de l’avenir. Les conséquences du changement climatique sont déjà perceptibles sur l’état des ressources en eau, la sécheresse toujours en cours le démontre. La poursuite des actions engagées et leur amplification est donc un impératif pour répondre aux enjeux du futur. Pour pouvoir atteindre le bon état des eaux et satisfaire à ses engagements européens, la France se doit de maintenir et de garantir les capacités d’interventions des agences de l’eau et leurs moyens. Il en va de la crédibilité de la politique de l’eau française.

 

Nous vous prions d’agréer, Messieurs les Ministres, l’expression de notre considération respectueuse.

 

Michel DUBROMEL,
Président de France Nature Environnement

 

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