Les récentes déclarations du gouvernement annonçant une taxation des camions dans les mois à venir a suscité de nombreuses réactions. Quatre ans après l’abandon injustifié de l’écotaxe, alors que les routes se dégradent et que la pollution de l’air s’aggrave, la question de la prise en charge de ces impacts demeure à ce jour non tranchée : qui paye quoi, et comment ? Confrontées à une nécessaire évolution de leur modèle économique, et donc social, les organisations professionnelles s’inquiètent, et s’expriment avec au passage quelques contre-vérités. France Nature Environnement souhaite rétablir les faits et œuvrer pour une mobilité plus vivable et durable.
Beaucoup d’avantages pour beaucoup de pollution et de dégradation des routes
Le secteur des transports est un des secteurs les plus émetteurs de polluants et de gaz à effets de serre. La circulation des camions en particulier a un impact grave sur la santé des Français et sur leurs finances… Aujourd’hui, c’est le contribuable qui paye via la Sécurité Sociale pour les soins rendus nécessaires par les pollutions générées par le trafic routier[1]. C’est aussi le contribuable qui paie pour l’entretien des routes, bien que la circulation des camions soit bien plus impactante que celle des véhicules particuliers.
Et pourtant, ce secteur bénéficie de nombreux cadeaux fiscaux, dont certains ont été accordés en contrepartie de l’écotaxe… qui n’a jamais été mise en œuvre ! Parmi ces cadeaux : environ 1,6 milliards d’euros sur la fiscalité du gazole en 2019 (dont près d’un milliard d’exonération de la contribution climat-énergie ou « taxe carbone »), contrairement aux voitures particulières.
C’est la raison pour laquelle France Nature Environnement a lancé une pétition pour demander la fin des cadeaux fiscaux toxiques accordés aux poids lourds de la pollution de l’air. Pour Gérard Allard, du réseau Transports et mobilités durables de France Nature Environnement, « il est plus que temps de mettre fin aux exonérations des camions sur la taxe carbone. D’une façon ou d’une autre, chacun doit payer pour les pollutions et la dégradation des routes qu’il génère. C’est une question de justice et un impératif écologique ».
Moins de mauvaise foi, plus d’équité
Applicable sur les camions français et étrangers utilisant les réseaux routiers en échange d’une somme forfaitaire, la « vignette poids lourds » représente l’un des dispositifs étudiés par le gouvernement pour financer l’entretien de ces infrastructures, nécessaire pour assurer les transports du quotidien. Les fédérations de transporteurs routiers crient au scandale face à l’annonce d’une nouvelle « taxe », après les annonces de hausse du montant des carburants. Oubliant qu’ils ont proposé cette même vignette en 2015 en lieu et place… de l’écotaxe, et qu’il s’agit simplement d’appliquer le principe utilisateur-payeur.
France Nature Environnement demande que les bons signaux, notamment fiscaux soient envoyés. Une fiscalité des transports plus équitable doit in fine permettre que chaque utilisateur finance le coût d'entretien de l'infrastructure lorsqu'il effectue un trajet (via la mise en place d’une redevance kilométrique d’utilisation des routes pour les poids lourds de plus de 3,5 tonnes). Sur le principe du pollueur-payeur, France Nature Environnement plaide également pour une intégration progressive d'une partie du coût de la pollution de l’air et du bruit dans les péages autoroutiers poids lourds.
Pour Michel Dubromel, président de France Nature Environnement, « la vignette poids lourds constitue une réponse moins efficace et pérenne qu’une redevance kilométrique poids lourds, mais elle a le mérite de mette en œuvre le principe utilisateur-payeur. Les recettes dégagées pourront contribuer à une mobilité plus durable, et financer un service plus fiable et régulier des trains du quotidien par exemple ».
Pour aller plus loin :
- 7 propositions clés de France Nature Environnement pour la future Loi d’orientation des mobilités
- Camions : ces cadeaux fiscaux toxiques accordés aux poids lourds de la pollution de l’air
[1] La pollution de l’air est la 3ème cause de mortalité en France derrière le tabac et l’alcool. Chaque année, 52 000 personnes décèdent prématurément et le coût sociétal en soins est chiffré à 101,3 milliards d’euros par an (OMS).
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