Plateforme Eau de la FRANE - 1ère partie

Première partie : la gestion et la restauration des milieux aquatiques


1. Les rivières des limagnes

 

C’est en plaine, alors que leur courant devient plus lent et que se déposent les alluvions, que les rivières et leurs abords deviennent des lieux de stockage. Ce stockage se fait grâce à un fonctionnement particulier des rivières, des nappes et des zones humides qui y sont associées. Mais ces écosystèmes sont dégradés de plus en plus par des aménagements et des activités divers ! Il est donc indispensable de restaurer et de préserver leur fonctionnement naturel au regard de l’enjeu qu’il représente en matière de gestion de l’eau (fourniture d’eau potable, épuration de l’eau, amortissement des crues), mais aussi de biodiversité.

 

Il faut noter que même en plaine alluviale, nos cours d’eau son relativement rapides ; leur puissance d’érosion sur leurs berges et leurs déplacements latéraux en sont accentués d’autant. La pente de l’Allier alluvial est de 1,50 m/km alors qu’en Loire moyenne la pente est d’environ 35cm/km.

 

Le respect de la libre divagation latérale des cours d’eau dans leurs alluvions :

 

La divagation d’un cours d’eau mobile dans ses alluvions latérales est en mesure de réaliser le maintien à niveau de sa ligne d’eau et de sa nappe alluviale, le soutien corrélatif des étiages, la diversité et l’étendue des milieux et l’auto-épuration des eaux dans ces milieux, l’étalement et l’amortissement des crues, le décolmatage périodique des alluvions, condition essentielle de bon fonctionnement du système fluvial (cf « Allier alluvial », édition FRANE 1999). Dans leurs cours inférieurs, la Besbre, la Loire mais surtout l’Allier en sont de bonnes illustrations.

 

Pour préserver à la fois le fonctionnement des cours d'eau, les espaces sauvages inondables et les nappes alluviales, la FRANE milite pour l’interdiction stricte des nouvelles protections de berges non justifiées par la présence de lieux  fortement urbanisés et techniquement protégeables. Il faut entendre par protection, les enrochements, les digues ou tout autre procédé s’opposant à l’érosion ou aux crues. Concernant les protections existantes, non justifiées par les biens en jeu, la FRANE milite pour leur non-entretien voire leur effacement. Lorsque l’enjeu est une infrastructure, son déplacement ou sa modification pour la rendre perméable au comportement naturel du cours d’eau est un impératif de restauration formulé par la Directive Cadre européenne sur l’Eau et soutenu par la FRANE. Il est à noter que la divagation fluviale peut se produire, à la longue, sur des terrasses hors crues sur toute l’emprise de la nappe alluviale.

 

Dans tous les cas, il est nécessaire en préalable à toute intervention d'évaluer les coûts de protection par rapport au bien menacé et d'analyser les solutions alternatives possibles.

La FRANE souhaite que son avis, ou celui de l'une de ses associations membres, soit systématiquement pris pour l'appréciation de la pertinence d'une nouvelle protection ou de l'entretien d'une protection existante.

 

La FRANE demande l’interdiction de toute construction nouvelle dans les zones de divagation potentielle non densément urbanisées. Il s’agit de constructions privées ou publiques qui appelleraient ou constitueraient un obstacle à la divagation (dans l’immédiat ou  de façon différée).

Il est à noter, qu’en plus de leur nocivité du point de vue hydrologique, ces constructions sont souvent le siège de pollutions chroniques ou accidentelles sur des sols très perméables au dessus de la nappe alluviale sous jacente et à faible profondeur.

 

La prévention des crues et la préservation des zones inondables :

 

Les crues, quelle que soit leur importance, sont des phénomènes indispensables à la vie des rivières. Ainsi les zones inondables ne doivent être occupées que de façon précaire, réversible et non polluante (la nappe est à quelques mètres sous la surface). Face au risque des inondations majeures, les barrages écrêteurs de crues n’apportent pas de sécurité absolue, mais de plus ils suppriment la dissuasion et la prudence en matière d’occupation des zones inondables. Le projet de barrage écrêteur au Veurdre, avec 150 millions de m3, ne pourrait pas écrêter sensiblement les grandes crues de l’Allier dont celle par exemple de 1790 qui fut estimée proche de 7 000 m3/s. Ces crues sont susceptibles de recouvrir la totalité des alluvions modernes dont la largeur variable peut aller jusqu’à 8 km. Les digues n’apportent pas non plus de sécurité absolue ; de surcroît elles inhibent l’étalement et l’amortissement des courants de crue.

 

La FRANE demande l’interdiction de toute construction nouvelle en zone inondable par les plus fortes crues et par extension sur les alluvions modernes.

 

La FRANE (à l’instar du SDAGE Loire-Bretagne) condamne les remblaiements et endiguements qui ne seraient pas justifiés par la protection d’implantations humaines manifestement indéplaçables (un lieu densément urbanisé par exemple). Les levées, digues ou remblais en travers des rivières, institués par la loi sur les risques du 30 juillet 2003 pour augmenter les champs d’inondation et écrêter les crues, ne doivent pas réduire les zones de divagation fluviales et sont inadmissibles sur des rivières dont ils sont incapables de réduire les grandes crues.

 

La prévention des crues nécessite de bien connaître les zones inondables. Les Plans de Prévision du Risque Inondation sont à établir, ou à réviser si besoin, en tenant compte non seulement des crues connues mais aussi de celles plus fortes qui peuvent survenir. L’éboulement des berges est un risque à intégrer dans ces plans. La culture du risque doit être développée (information et sensibilisation des riverains et des différents acteurs). Des repères de crues doivent être établis sur le terrain.

 

L’entretien des rivières :

 

Face à l’érosion ou aux crues, le principe préconisé est d’adapter les aménagements au comportement du cours d’eau et non l’inverse. Les remaniements du lit des rivières pour accélérer l’écoulement des eaux ou prévenir une érosion de berge sont à prohiber. Désobstruer le chenal d’écoulement, notamment par déboisement et scarification, ne peut être accepté que dans la traversée d’une ville concernée par un risque d’inondation ; les atterrissements alluviaux enlevés à cette occasion doivent être reposés sur d’autres rives proches, exposées au recyclage par le courant, notamment dans des fosses d’extraction pour en faciliter l’effacement.

 

La restauration des rivières :

 

Faute de pouvoir mobiliser leurs alluvions latérales, les rivières, pour la plupart, ont accusé en quelques décennies un abaissement de leur fond et de leur ligne d’eau (abaissements de 2 m en moyenne et plus par endroits pour l’Allier). Les conséquences en sont multiples et néfastes (cf document de la FRANE sur le relevage du plancher fluvial – avril 2004). Il faut désormais restaurer le comportement naturel des cours d’eau qui se traduit par l’érosion des berges, seul phénomène susceptible de combler le surcreusement du sillon fluvial et de compenser durablement la fuite des alluvions vers l’aval.

L’érosion se fera (progressivement) au détriment des propriétés riveraines. A cet égard, les programmes de restauration (Plan Loire, SAGE…) doivent apporter des mesures compensatoires.

Le surcreusement du lit ou son comblement n’ont pas d’effet réducteur ou amplificateur sur les inondations majeures.

 

La restauration des rivières passe donc par la libération des zones érodables. L’effort financier de restauration doit être affecté à faire tomber progressivement ces zones dans le domaine public fluvial.

 

D’autre part, les infrastructures, notamment celles traversant les vals sur remblais, occasionnent un resserrement de la zone de divagation. La multiplication et le rapprochement de ces ouvrages reviennent à endiguer la rivière par épis successifs. La restauration implique que les infrastructures nouvelles soient prévues accolées à des ouvrages déjà existants pour ne pas contraindre davantage la zone de divagation. En outre, l’inéluctable nécessité de relever la ligne d’eau, et de restaurer la dynamique latérale, devrait conduire dès à présent à construire toute nouvelle voie de communication sur viaduc, c’est à dire sur piles et arches dans toute la traversée au-dessus des alluvions modernes ; ceci pour ne pas surcharger le coût d’adaptation des voies construites antérieurement sur remblais qu’il faudra, un jour ou l’autre, rendre également perméables aux divagations fluviales.

 

Inscription Newsletter

captcha 

Se connecter